Du 18 au 23 septembre 2023, Ali Ouattara, le Représentant-Résident du Programme alimentaire mondial (PAM) au Bénin a effectué une tournée dans plusieurs communes des départements de l’Alibori, du Borgou et de l’Atacora. L’objectif de cette tournée étaitde procéder au lancement des activités des cantines scolaires pour le compte de l’année scolaire 2023-2024, mais aussi toucher du doigt la réalité de la mise en œuvre du Programme national d’alimentation scolaire intégré. Dans cette interview qu’il a accordée à la presse, Ali Ouattara fait le point de cette tournée qui l’aura conduit de Kandi à Toucountouna en passant par Banikoara, Gogounou, et Parakou vers les acteurs de la chaine de mise en œuvre du PNASI.
Le 18 septembre dernier, vous vous êtes rendus dans une école du département de l’Alibori pour procéder au lancement des activités des cantines du PNASI. Pourquoi le choix de l’Alibori ?
Nous avons choisi le département de l’Alibori parce que, comme vous le savez, en dehors des questions liées à l’alimentation scolaire, il y a aussi depuis un certain temps, l’insécurité qui a entraîné des déplacements de populations et la fermeture de certaines écoles. Nous sommes venus dans ce département pour traduire notre soutien aux populations et leur dire qu’elles ne sont pas seules et que même si on est loin, on veut s’approcher de la réalité et les encourager à poursuivre le travail que nous avons entamé ensemble. C’est dans ce sens que nous avons décidé de venir dans le département de l’Alibori et dans l’école primaire de Koutakroutou dans la commune de Kandi.
Nous avonsaussi eu une mission conjointe du Système des Nations-Unies (le 23 septembre 2023 à Matéri et à Tanguiéta, ndlr)qui avait été sollicité par le gouvernement pour apporter une assistance aux personnes réfugiés et déplacées internes qui ont subi l’insécurité. Nous avons lancé une opération de distribution pour les assister. On a fait d’une pierre deux coups.
Dans le cadre du PNASI, vous avez été dans plusieurs localités où vous avez visité des écoles à cantine et échangé avec de nombreux acteurs. Quel bilan en tirez-vous ?
Le bilan est dans l’ensemble satisfaisant en ce sens que nous avons vu un certain nombre de réalisations qui vont en droite ligne avec ce que nous attendons. Un programme d’alimentation scolaire ne peut être durable que s’il est approprié par la communauté. Nous avons pu constater à travers les autorités des structures déconcentrées, des structures décentralisées (les préfets, les maires) et aussi la communauté locale, une contribution et un engagement pour la mise en œuvre du programme. Il y a des contributions en nature, des contributions financières, également des réalisations d’infrastructures ici et là pour accompagner la mise en œuvre du programme. C’est à apprécier et comme on le dit, c’est vrai qu’il y a encore à faire et nous avons aussi profité de cette tournée pour sensibiliser les communautés, les autorités locales pour qu’elles puissent s’engager davantage à accompagner ce vaste programme de protection sociale qu’est le PNASI.
Nous avons aussi vu certaines choses qui ne marchent pas, comme l’absence d’eau, d’infrastructures de cuisine, de magasin, etc., afin de demander à ces différents acteurs d’apporter leur contribution. Nous avons connu des cas de cambriolage dans certaines écoles du fait qu’il n’y avait pas de magasin assez sécurisé. Il faut que la communauté contribue à cela. Malgré le fait que certains magasins étaient bien sécurisés, il y a eu des cas de cambriolage. Ce sont des préoccupations et nous avons demandé aux autorités et aux communautés locales de voir comment elles peuvent s’organiser pour mieux sécuriser les vivres. C’est un aspect important.
L’autre point, c’est l’engagement que nous avons avec les petits producteurs. Le programme d’alimentation scolaire intégré concerne plusieurs secteurs, pas seulement celui de l’éducation. Nous avons l’agriculture, le transport, la santé, la nutrition, etc. Nous avonsune action ciblée vers les petits producteurs parce que nous voulons augmenter le volume des achats au niveau local et essayer voir comment la quasi-totalité des produits utilisés dans les cantines soient des produits locaux, mais venant surtout des petits producteurs. Nous avons rencontré certaines coopératives pour discuter avec elles de l’augmentation du volume des achats, de leurs difficultés et des solutions qu’on peut y apporter afin qu’on avance ensemble. Il y a de belles perspectives et la dynamique est déjà là. Nous avons acheté 300 tonnes en 2021, 901 tonnes en 2022 et nous projetons d’acheter au moins 7500 tonnes en 2023. Ce qui représente environ 800% d’augmentation.
Pour la durabilité du programme, nous avons, dans le cadre de la planification initiale, la dynamique de le transférer au gouvernement. Nous sommes dans la dynamique de renforcer la capacité de la partie nationale de sorte qu’à terme on puisse le transférer au gouvernement pour une mise en œuvre par les autorités nationales.
Quels espoirs avez-vous aujourd’hui s’agissant de l’appropriation du PNASI par les communautés?
La communauté doit apporter sa contribution. Quand on parle de la communauté, il s’agit des parents d’élèves, des maires, des préfets, etc., qui apportent leur pierre à l’édifice. II y a aussi au niveau central, un organe qui est en train d’être mis en place et à qui le programme va être transféré, qui va continuer à coordonner avec les communautés. C’est tout un ensemble d’acteurs qui doivent se donner la même afin de pouvoir assurer la mise en œuvre efficace du programme, avec toujours l’accompagnement du PAM qui est la structure technique, compte tenu de l’expérience que nous avons non seulement au Bénin, mais aussi dans d’autres pays pour pouvoir accompagner ce processus.
Quel message avez-vous à l’endroit des différents acteurs ?
Le message, c’est de dire qu’on sollicite toujours leur accompagnement. Un programme d’alimentation scolaire ne peut être durable que s’il est approprié par la communauté locale, les parents d’élèves, les maires, les préfets, les préfets, la sécurité, etc., au niveau local. Au niveau central, le gouvernement a déjà un très bon engagement, engagement des plus hautes autorités d’une part, engagement financier d’autre part du fait qu’il apporte la quasi-totalité de la couverture financière du programme même s’il y a d’autres financements que nous mobilisons du côté du PAM pour accompagner le programme. Nous avons déjà cet engagement institutionnel du gouvernement et les communautés devraient davantage apporter leur soutien, sécuriser les vivres pour les enfants. Parce que ça fait plaisir de voir les enfants à l’école, et même de tous petits enfants qui vont à l’école parce que les parents veulent qu’ils profitent du cadre scolaire et de la cantine scolaire. On a constaté certaines innovations, des contributions qui vont à quelques millions de francs CFA. On a entendu parler de « Franc bétail », de « Franc coton »… Ce sont de bonnes initiatives qu’on peut dupliquer afin d’assurer une durabilité du programme.
Réalisé par Flore S. NOBIME