Le professeur Olabiyi Yaï, très connu des milieux culturels, n’est plus de ce monde. Il a rejoint ses aïeux ce 05 décembre 2020. Un coup dur pour les acteurs culturels qui ne s’en reviennent pas, à l’annonce de cette disparition.
François Sourou Okioh en est un. Dans un message émouvant, dont LeParakois vous propose l’intégralité, le Réalisateur de films, Collecteur de mémoires et Coordonnateur Général de Salon du livre et Écrits en Langues Nationales de Dassa (SALELANAD) regrette l’illustre disparu qu’il appelle affectueusement ”Fofo” et ”Dady”.
Lire le texte d’hommage du professeur François
Sourou Okioh.
LE PROFESSEUR Olabiyi B. YAÏ S’EN EST ALLE
Daddy,
Dans l’élégance du geste et de la parole, tu as laissé une des pages de ton combat et de ton testament dans les recommandations issues du SALON DU LIVRE ET ECRITS EN LANGUES NATIONALES DE DASSA, des 23, 24 et 25 juillet 2020 à ARIGBO HÔTEL DE DASSA.
Dans ton discours inaugural qui lançait le SALON tu nous as tous avertis avec cette ode de IFA ORUNMILA tirée de okanran sodé : c’est-à-dire : « A force de cheminer avec le chien, on devient consommateur de fientes. « Aja Olodé ni un muran kpére olodé » c’est-à-dire : « Le chien d’Olodé prétend être plus intelligent qu’Olodé » pour démontrer la fausse route qu’a empruntée par prétention. le nabot de l’intelligence en matière d’écrits en langues nationales.
Ainsi tu nous as amenés à comprendre et pour prendre conscience qu’entre : L’écriture nilotique il y a trois mille ans avant l’ère chrétienne et l’année de parution d’ « “Iwé itan Ajashe » 1925 ; 1925 et les indépendances en 1960 et 1960 et 2020 après soixante années d’indépendance, le « sot extraverti » a jeté sa langue, sa culture et sa civilisation, a refusé de rendre hommage à ses ancêtres et s’est confiné dans une alphabétisation en langues, cultures et civilisations étrangères aliénantes.
A l’attention de tous les participants, tu as récapitulé ton discours en disant : Pour une culture de l’écriture : C’est-à-dire « la langue, c’est son écriture ; les indicateurs du développement sont le savoir-parler, le savoir-lire, le savoir-calculer et le savoir-écrire en langue nationales. Enfin tu as recommandé qu’à partir de l’édition de 2021 du SALON que des prix annuels dans plusieurs genres littéraires en langues nationales soient décernés pour encourager des écrivains, des journalistes et autres animateurs des langues. Tu as demandé que le journal en langues nationales, initié par l’Association Culture communication et Développement (ACcD) soit soutenu par le Ministère en charge des langues nationales et les commissions et sous commissions linguistiques afin d’offrir aux alphabétisés de quoi lire.
Fofo, tu avais ouvert ce Salon, (SALON DU LIVRE ET ECRITS EN LANGUES NATIONALES DE DASSA (SALELANAD), la charge te revenait de le clôturer et tu nous as encore dit : « Le Salon du Livre et Ecrits en Langues Nationales de Dassa (SALELANAD) étant à son ouverture, j’essayerai de prononcer un discours d’ouverture. On ne remerciera jamais assez, je crois que nous avons le devoir d’abord de remercier nos ancêtres à nous tous. Il faut les remercier de nous avoir permis d’être ici et d’avoir été constamment ici et d’avoir travaillé et d’avoir obtenu les résultats que nous avons.
Le travail que nous faisons est la source du bonheur de nos peuples et je voudrais dire enfin que nous devrions nous féliciter malgré tout parce que le travail que nous faisons est un travail de militants. Nous militons pour le droit d’être humain parce que c’est la langue qui distingue l’homme des animaux. Le militantisme que nous sommes en train de mettre en œuvre, c’est pour le droit d’être des hommes à part entière. C’est le début d’un long voyage. »
Le 25 juillet avant de nous séparer, tu as accepté de mettre à terre un cocotier sur le site ODUDUWA qui abrite Radio Ilèma pour symboliser le « début de ce long voyage : Notre libération. »
Daddy, comme j’aimais t’appeler souvent tu es pour moi un Omo Oluwabi simplement. Héritier, disciple ? Non. Pour tout ce que tu m’as donné, pour tout ce que tu nous as donné avec amour et passion et surtout pour le testament élégamment dit dans ton discours de clôture du SALELANAD 2020, l’Association Culture communication et Développement (ACcD), tous les partenaires, et moi-même ton jeune frère, t’assurons de notre détermination à jouer notre modeste partition dans cette longue expédition qui commence avec ce Salon et tout le combat qui l’accompagne.
Déjà nous pouvons t’annoncer que le SALELANAD pour immortaliser ton combat dans la conscience des générations montantes, débutera désormais tous les 05 décembre de chaque année, date de ton rappel à Dieu. Aussi nous lançons dès les semaines à venir le Prix de la Meilleure Nouvelle en Langues Nationales. Prix Olabiyi Babalola YAÏ
Daddy ! Non, une vie ne disparaît pas parce que la mort la tranche. Elle change de forme. Il n’y a de victoire de la mort qu’à l’instant où toute vie s’arrête. Ou bien tu maîtrises ta vie et tu t’ouvres aux autres, à tes racines au souvenir des tiens, dans un dialogue permanent et tu crées des œuvres et ta mort n’est plus ta disparition, mais une transformation de ton être, et tu restes présent, éternel, ou bien ta vie est désordre, égoïsme, violence, mensonge, trahison et tu ne laisses rien et ta mort, alors ferme ton histoire à jamais… Fofo, tu pars et tu nous laisses orphelins.
Fofo, aimant, très attachant et bien droit et vrai dans tes critiques et observations. Tu m’as fait comprendre entre autres, que la vie contient beaucoup de cadeaux et qu’être vivant, c’est accueillir la vie, qu’il faut la valoriser, l’amplifier et la répandre à notre tour. Grâce à toi, j’ai compris que nous recevons des cadeaux de vie si nous savons les accueillir, mais que nous pouvons aussi en offrir, en répandre, en créer, tout en restant vrais.
Merci Daddy pour tout. OLODUMARE t’accueille dans son Royaume comme un prince OMO OLUWABI
François OKIOH
Réalisateur de films/Collecteur de mémoires
Coordonnateur Général de SALELANAD