Dans une sortie médiatique très attendue sur Canal 3 Bénin, Richard Boni Ouorou a affiché avec une assurance déconcertante son ambition politique à travers la création du parti Le Libéral. Mais derrière cette façade de renouveau idéologique se cache une tentative à peine voilée de décrédibiliser la véritable opposition incarnée aujourd’hui par le parti Les Démocrates. Alors que le Bénin traverse une crise politique marquée par la détention de prisonniers politiques et l’exil forcé de nombreuses figures de l’opposition, Boni Ouorou préfère attaquer ceux qui, au prix de leur liberté et de leur sécurité, se battent pour le retour à l’État de droit. Ce faisant, il se positionne davantage comme un électron libre au service d’une stabilité de façade que comme un acteur sérieux du changement.
Sous couvert d’objectivité, il tente de relativiser les restrictions actuelles des libertés en les attribuant à des régimes passés. En évoquant l’arrestation de Kassa Mampo sous le régime Yayi Boni, Boni Ouorou montre sa volonté de diluer les responsabilités et d’épargner le régime actuel, pourtant reconnu pour sa dérive autoritaire. Cette posture est d’autant plus discutable que depuis 2016, les reculs démocratiques sont massifs et documentés : interdiction de manifestations, verrouillage du système partisan, musèlement de la presse et arrestations politiques. Plutôt que de condamner clairement ces dérives, Le Libéral adopte un discours ambigu, ni chaud ni froid, qui trahit un manque de courage politique.
Pire encore, Richard Boni Ouorou ose attaquer les efforts symboliques et pacifiques du parti Les Démocrates, comme la messe en mémoire des exilés et prisonniers politiques. Il qualifie ces gestes de « m’as-tu-vu », alors même que ce sont ces marques de solidarité qui maintiennent vivante la mémoire de ceux qui souffrent pour leurs convictions. En refusant toute alliance avec Les Démocrates, il envoie un signal clair : celui de la division dans un moment où l’unité de l’opposition est plus que jamais nécessaire pour arracher les droits confisqués au peuple béninois. La vraie bataille ne se joue pas dans les studios télévisés, mais dans le quotidien de ceux qui subissent les conséquences du régime.
Enfin, Boni Ouorou se targue de porter une « offre politique totalement différente », fondée sur un libéralisme adapté au Bénin. Or, ce projet reste flou, sans propositions concrètes pour résoudre la crise sociopolitique actuelle. L’urgence au Bénin n’est pas la multiplication des partis politiques, mais l’émergence de voix sincères, crédibles et courageuses pour exiger la libération des détenus politiques, le retour des exilés et la restauration des libertés publiques. En s’attaquant à Les Démocrates, Boni Ouorou choisit le confort des plateaux télé plutôt que la rigueur du combat politique. Ce n’est pas d’un nouveau logo que le peuple béninois a besoin, mais d’une volonté réelle de changement.