«La faim sort le loup du bois ». C’est la caricature qui convient de donner au sens de la démarche depuis quelques jours du régime Talon au Bénin. Après plus de 8 ans de gouvernance presque sans écoute, le chantre de la rupture et son équipe font maintenant l’option d’investir les différentes localités pour disent-ils, rendre compte de leur gestion. Une posture contraire à celle à laquelle les Béninois ont été habitués et qui intervient à moins de deux ans de la fin du pouvoir constitutionnel. 2026 semble bien sortir le régime de la rupture de sa tanière.
Sentant la fin venir, Talon envoie ses ministres et les cadres de son gouvernement prêcher leurs œuvres aux populations. Une démarche qui contraste avec l’image que les Béninois retiennent d’eux. Après 8 ans d’isolement dans l’austérité, ils deviennent extraordinairement plus attentionnés et dociles avec le peuple qu’ils ont longtemps réduit au silence. A la lecture des choses, il s’agit bien des enjeux électoraux de 2026 qui font courir la majorité présidentielle.
Autrement, y-a-t-il des actions de ce régime méconnues des populations ? Fait-on une reddition des comptes sans évoquer les coûts des réalisations ? La reddition des comptes se limite-t-elle à un inventaire des actions ? Faire une reddition sans expliquer aux Béninois ce qu’est le Bénin control pour l’économie du pays, ce que coûte le leasing des véhicules administratifs aux contribuables, cela ressemble à de la diversion. Pendant que les salaires des ministres demeurent un secret de couvent, le peuple n’a même pas eu l’occasion d’avoir quelques bribes d’information sur le fameux événement de vodun day. Le coût de réalisation des infrastructures reste un mystère. L’affaire de granite de la Norvège est toujours dans la mémoire des Béninois. Comment se porte la presse béninoise ? Les acteurs et les entreprises de presse s’en sortent-ils mieux sous la rupture ? Motus !
Et puisqu’il est question de bilan, parlons de Parakou.
A Parakou, la principale ville du nord du pays, mis à part le projet asphaltage brandi à toutes les occasions comme un trophée de guerre, qu’a réellement bénéficié cette troisième ville à statut du Bénin ? Les projets et structures phares d’un développement structurant ont été soit rachetés ou abandonnés. Cobemag, Ocbn, Sonapra, Sonacop, Coteb et autres n’existent désormais que dans les souvenirs des Parakois. Quant au port sec et l’aéroport international de Tourou, deux infrastructures devant révolutionner le septentrion ont été snobés. L’aéroport de Tourou, une infrastructure d’envergure qui devait donner un certain équilibre de développement des régions du pays a été mis en berne par le chantre de la rupture. Les techniciens formés au profit de cet aéroport ont été snobés sans aucune assistance. Quant aux équipements, ils s’esquintent au jour le jour depuis huit ans.
“Reddition des comptes”, ont argué les thuriféraires du régime pour justifier leurs opérations de charme. A minima, une reddition de compte concerne également les investissements opérés. Ou alors, la rupture invente sa roue, sa propre conception.
Tout semble bien une démarche, pour une fois de plus occuper les populations en quête du pain quotidien. La masse paysanne quant à elle, se trouve déboussolée. La commercialisation des produits agricoles devient un défi. Les produits tropicaux comme le cajou et le soja, autrefois des produits de grands profits pour les agriculteurs, sont de plus en plus au centre des manœuvres. Le producteur n’a plus la chance de décider du prix de vente et du client. Tout semble bien verrouillé dans un système qui ne favorise pas le producteur. Dans un tel contexte, l’auditoire des membres du gouvernement n’est constitué que de personnes tirées sur le volet.
A tout point de vue, les élections générales de 2026 chassent le loup de la forêt. Pourvu que cela leur marche. Sinon l’oreille de l’agriculteur devient moins réceptive aux discours déjà entendus. Les messages des émissaires de la rupture apparaissent comme des prêches dans le désert. Cette tournée sonne plutôt comme une campagne électorale anticipée.