Alors que les députés s’apprêtent à se pencher ce vendredi 14 novembre sur la proposition de loi introduisant un Sénat au Bénin, le débat divise la classe politique et interroge la société civile. Pour le politologue Mathias Hounkpè, la question essentielle n’est pas de savoir si le Bénin a besoin d’une seconde chambre parlementaire, mais plutôt si le moment et la méthode choisis inspirent confiance. « En fin de mandat, toute réforme constitutionnelle soulève naturellement la suspicion », souligne-t-il, rappelant que l’histoire politique récente du continent regorge d’exemples où de telles initiatives ont été perçues comme des manœuvres de verrouillage politique plutôt que comme des avancées démocratiques.
Selon lui, le processus actuel souffre d’un manque d’inclusivité et de transparence. La rapidité avec laquelle le projet semble être conduit laisse planer le doute sur la volonté réelle du pouvoir d’engager un débat national ouvert et pluraliste. Dans un contexte où la méfiance envers les révisions constitutionnelles demeure profonde, la méthode employée risque d’affaiblir la crédibilité de l’initiative. « Une réforme aussi structurante que la création d’un Sénat mérite une large concertation nationale, non une procédure conduite à huis clos », insiste Hounkpè, appelant à replacer le citoyen au centre du débat institutionnel.
L’autre inquiétude majeure réside dans la composition et l’équilibre politique du futur Sénat. D’après les projections du politologue, la coalition au pouvoir pourrait, à court comme à moyen terme, contrôler la quasi-totalité des institutions, y compris la présidence de la République, l’Assemblée nationale et, par ricochet, le Sénat. Une telle concentration du pouvoir risquerait d’affaiblir le principe de contrepoids démocratique que la réforme prétend instaurer. « Si la représentation territoriale devient une prolongation du pouvoir central, on passe à côté de l’esprit même du bicamérisme », prévient-il.
Pour Mathias Hounkpè, la légitimité d’une réforme constitutionnelle tient autant à son contenu qu’à son contexte. À ses yeux, la prudence politique, la transparence et la concertation ne doivent pas être perçues comme des obstacles, mais comme des garanties de stabilité et de confiance. Alors que le Parlement s’apprête à débattre du texte, le politologue invite les élus à faire preuve de hauteur d’esprit et à replacer l’intérêt national au-dessus des calculs partisans. La création d’un Sénat, conclut-il, ne sera bénéfique que si elle s’inscrit dans une démarche sincèrement démocratique et inclusive.















