Le ton de sa déclaration est ferme. L’ancien président Thomas Boni Yayi l’a publiée sur sa page Facebook, lundi. Il y dénonce le projet de révision constitutionnelle visant à instaurer un Sénat. Pour lui, cette initiative traduit une dérive antidémocratique et menace l’équilibre institutionnel patiemment bâti depuis la Conférence nationale de 1990.
Depuis lundi soir, sa sortie sur le réseau social Facebook ne passe pas inaperçue dans le paysage politique béninois. Par un communiqué rendu public, Thomas Boni Yayi, ancien président de la République (2006-2016), a vertement critiqué la proposition de loi actuellement en examen à l’Assemblée nationale. Celle-ci prévoit la création d’une nouvelle chambre parlementaire : le Sénat. Pour lui, cette démarche ne répond à « aucune exigence démocratique » et intervient dans « un climat d’exclusion » qui, alerte-t-il, « fragilise la cohésion sociale » et « compromet la sérénité du débat républicain ».
Le Président du parti d’opposition Les Démocrates ne mâche pas ses mots : la création d’un Sénat serait une « initiative antidémocratique », contraire aux principes de la séparation des pouvoirs et à la logique d’un État équilibré.
Dans sa déclaration, il va plus loin. Il accuse les initiateurs de cette loi de vouloir « servir un seul homme », au détriment de l’intérêt général. Sans le nommer, le message vise clairement le président Patrice Talon, dont les réformes institutionnelles divisent le pays depuis plusieurs années.
L’ancien locataire du Palais de la Marina rejette catégoriquement toute idée d’intégrer cette future institution, même en tant que membre de droit : « Je ne saurais en aucun cas faire partie de cette institution ni cautionner un tel projet », écrit-il, et dénonce une « dérive institutionnelle » susceptible de « mettre en péril les acquis démocratiques chèrement obtenus par le peuple béninois ».
Yayi s’est également adressé directement aux députés du parti Les Démocrates. Il les exhorte à faire bloc contre cette réforme : « par leur minorité de blocage, ils auront le mérite de rendre la parole au peuple », plaide-t-il. Il appelle à une consultation populaire par voie référendaire. Une manière de rappeler que, dans l’histoire récente du Bénin, les grandes orientations politiques ont souvent trouvé leur légitimité dans le dialogue national et le consensus.
Boni Yayi se pose en gardien des valeurs de la Conférence nationale et de la démocratie béninoise d’où son appel à « sauver la patrie ». En face, Patrice Talon, son successeur, veut à tout prix réformer. La seule question qui vaille à l’heure actuelle est la suivante : jusqu’où peut-on refaçonner la République sans trahir son esprit démocratique ?
Faradj ALI YAROU
















