Face aux maires, préfets et secrétaires exécutifs réunis à Cotonou le vendredi 13 juin 2025, le président Patrice Talon a prononcé un discours empreint de solennité et de gratitude. Se voulant rassembleur, il a salué la qualité des échanges avec les élus locaux et réaffirmé l’importance de la collaboration entre le pouvoir central et les communes. Mais ce qui a le plus retenu l’attention, c’est sa déclaration teintée d’émotion, laissant entendre qu’il ne se représenterait plus. « Je crois que je n’aurai plus l’occasion d’avoir une telle rencontre avant de passer la main », a-t-il lancé, comme un adieu anticipé.
Cependant, pour beaucoup d’observateurs et d’acteurs politiques interrogés par LeParakois, ce discours laisse planer plus de doutes que de certitudes. L’homme avait pourtant promis, à son arrivée au pouvoir en 2016, de faire un seul mandat. Neuf ans plus tard, il entame la dernière ligne droite de son deuxième mandat, avec une Assemblée nationale largement acquise à sa cause. Même si l’opposition a enfin retrouvé des sièges depuis 2023 avec le parti Les Démocrates, le paysage politique reste dominé par les formations proches du régime, et aucune dynamique électorale sérieuse ne se dessine à moins d’un an de la prochaine présidentielle.
Le scepticisme s’amplifie d’autant plus qu’aucun signal clair de transition n’est visible du côté des états-majors des partis politiques. Pas de candidats potentiels en vue, pas de préparation apparente à la succession. L’annonce d’un futur séminaire gouvernemental pour examiner les recommandations des élus locaux sonne plus comme une promesse de continuité que comme un prélude au départ. Nombreux sont ceux qui redoutent un scénario où, au nom de la stabilité ou du développement inachevé, le président soit encore une fois “appelé” à prolonger son bail à la Marina.
Dans l’opinion publique, les réactions oscillent entre prudente espérance et lucide méfiance. Si certains saluent la hauteur de vue et la sagesse d’un chef d’État conscient des limites du pouvoir, d’autres y voient un énième tour de rhétorique. Les Béninois, témoins des promesses de 2016 restées sans suite sur la limitation des mandats, ne sont plus enclins à prendre les engagements politiques pour des vérités gravées. Dans ce contexte, la déclaration du 13 juin 2025 ressemble davantage à une parenthèse oratoire qu’à une garantie tangible d’alternance.