La montée fulgurante des cryptomonnaies attire non seulement les investisseurs, mais aussi une nouvelle forme de criminalité. En France, plusieurs cas d’enlèvements ou de tentatives visant des dirigeants d’entreprises crypto ou leurs proches ont récemment été rapportés, poussant le ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, à convoquer ce 16 mai 2025 les principaux acteurs du secteur pour discuter de leur sécurité. Une situation jugée préoccupante par l’économiste Jérôme Mathis, professeur à l’université Paris-Dauphine, qui analyse les raisons de cette inquiétante tendance.
Selon lui, les criminels identifient désormais les détenteurs de cryptomonnaies comme des cibles de choix. Contrairement aux objets de luxe qui perdent de la valeur lors de leur revente, les actifs numériques comme le bitcoin conservent toute leur valeur et peuvent être transférés instantanément, de façon intraçable, voire pseudonyme. « Ils recherchent un gain maximal avec une prise de risque minimale », résume l’économiste. L’instantanéité des transactions et l’absence d’intermédiaires bancaires facilitent aussi les demandes de rançon.
Si la blockchain permet de suivre les mouvements de fonds, elle ne garantit pas pour autant l’identification des auteurs. Cela crée un environnement où les malfaiteurs, qu’ils soient isolés ou organisés, peuvent agir plus facilement, en se servant des failles d’un système encore mal encadré juridiquement dans plusieurs pays. Le cas de David Balland, associé du cofondateur de Ledger Éric Larchevêque, enlevé avec sa compagne, illustre cette nouvelle vulnérabilité. Pour certains, comme Larchevêque, la situation évoque une “mexicanisation” de la France — une comparaison que Jérôme Mathis tempère, soulignant que ce phénomène est mondial et non propre à l’Hexagone.
L’enjeu est désormais double : rassurer les acteurs du secteur tout en adaptant les dispositifs sécuritaires à cette nouvelle réalité. Le gouvernement français semble vouloir éviter que la peur ne bride l’innovation. Mais il est clair qu’au-delà de la spéculation financière, l’univers des cryptomonnaies devient aussi un terrain d’affrontement pour la sécurité et la régulation. Le dialogue engagé entre l’État et les entreprises du secteur est donc une étape nécessaire pour construire un écosystème plus sûr et plus transparent.