Dans un entretien exclusif avec LeParakois, Moumouni Seydou, ancien coordinateur régional du Mouvement Démocratique pour le Renouveau (MDR) de Dosso, aujourd’hui militant indépendant, partage ses réflexions sur la gouvernance actuelle au Niger, les tensions entre son pays et le Bénin, et propose des pistes de sortie de crise.
1-LeParakois : Cela fait plus d’un an que les militaires ont pris le pouvoir au Niger. Comment, en tant qu’acteur de la société civile, vivez-vous cette période de transition ?
Moumouni Seydou : Vous savez, la décennie qui a précédé le coup d’État militaire du 26 juillet 2023 a été marquée par des dérives en matière de gouvernance : services publics défaillants, corruption, atteintes aux droits de l’homme, répartition inéquitable des ressources… Ces frustrations ont nourri un profond désir de changement chez les Nigériens.
Au début de la transition, de nombreux citoyens ont soutenu le régime militaire, mais aujourd’hui, la déception domine. L’instabilité, la corruption persistante et l’absence de justice minent la crédibilité de ce gouvernement. Toutefois, les Nigériens aspirent encore à un véritable renouveau, notamment en termes de transparence, de sécurité, et d’exploitation équitable des richesses nationales.
2-LeParakois : Êtes-vous en accord avec les autorités actuelles dans leur gouvernance ?
MS : Pas entièrement. Pour moi, la bonne gouvernance repose sur une confiance mutuelle entre dirigeants et citoyens. Malheureusement, la gestion des ressources reste défaillante, et les crises politiques et sécuritaires des dernières années en sont les conséquences directes.
3-LeParakois : Que reprochez-vous aux autorités actuelles ?
MS : Je reproche principalement leur négligence de la justice, qui est pourtant un pilier fondamental du développement. Après plus de 18 mois de transition, aucun prisonnier politique, civil ou militaire n’a été libéré. La Commission de Lutte contre la Délinquance Économique et Financière (COLDEF) n’a récupéré que 57 milliards de francs CFA, tandis que les auteurs de détournements continuent de circuler librement.
4-LeParakois : Que fait la société civile pour corriger le tir ou est-elle dépassée par les événements ?
MS : La société civile a un rôle crucial à jouer. Elle doit aller au-delà des revendications habituelles pour devenir un pont entre les communautés et les dirigeants. Nous continuons à exiger la transparence et à dénoncer les dérives du système.
5-LeParakois : La tension entre le Bénin et le Niger persiste. Que vous inspire cette situation ?
MS : Les accusations des autorités nigériennes contre le Bénin, qu’il s’agisse d’abriter des bases militaires ou de collaborer avec l’Occident, sont graves. Cependant, il est essentiel de privilégier le dialogue entre nos deux pays pour surmonter ces malentendus. Les tensions actuelles causent des préjudices majeurs à nos populations, notamment dans la zone des trois frontières.
6-LeParakois : Quelle proposition feriez-vous pour une sortie de crise ?
MS : Je propose la création d’un comité mixte Bénin-Niger, réunissant des membres des gouvernements, de la société civile, des médias, et des personnes ressources. Ce comité discuterait des sujets qui fâchent et formulerait des recommandations pour une réouverture progressive des frontières et un apaisement durable.
7-LeParakois : Quel message souhaitez-vous adresser pour conclure ?
MS : Nos deux États doivent revenir à la raison. Diviser nos peuples pour des raisons économiques et sociales est non seulement inutile, mais aussi dommageable pour l’avenir de nos nations. Le Bénin et le Niger sont interdépendants et doivent œuvrer ensemble pour leur prospérité commune.
Je souhaite une bonne et heureuse année aux peuples béninois et nigérien, ainsi qu’à toute l’Afrique !