Le géant français de l’énergie Orano a annoncé la suspension de la production d’uranium au Niger, effective à partir du 31 octobre 2024. Cette décision résulte de l’accumulation de défis logistiques, financiers et géopolitiques auxquels la filiale locale, Somaïr, fait face depuis plusieurs mois. Cette suspension marque un tournant majeur pour le Niger, dont l’uranium représente une ressource stratégique et vitale pour l’économie nationale.
Un Contexte Sous Haute Tension
Depuis le coup d’État de 2023, les relations entre la France et la junte nigérienne se sont envenimées, affectant directement les opérations de Somaïr, la seule mine d’uranium encore en activité dans le pays. La fermeture de la frontière avec le Bénin, principal corridor terrestre d’exportation de l’uranium, a paralysé les expéditions, laissant Orano sans possibilité d’acheminer sa production vers les marchés internationaux. Par ailleurs, la tentative de recourir à des transports aériens via la Namibie s’est heurtée à des refus catégoriques des autorités nigériennes, soucieuses de conserver la maîtrise des flux et des ressources nationales.
La Fin du Permis d’Exploitation d’Imouraren : Un Coup Dur pour Orano
En juin 2024, la junte nigérienne a révoqué le permis d’exploitation du gisement d’Imouraren, l’un des plus prometteurs d’Afrique, et censé devenir l’un des piliers du secteur minier au Niger. Cette décision a exacerbé les tensions avec Orano, qui avait investi massivement dans ce projet. Bien que le gisement d’Imouraren ne soit pas encore en exploitation, sa mise en service prévue à moyen terme aurait permis de renforcer la position du Niger parmi les principaux producteurs mondiaux d’uranium.
Un Impact Majeur sur l’Économie Nigérienne
Le Niger est le deuxième producteur africain et le septième mondial d’uranium, avec une production annuelle qui constitue entre 15 et 20 % de ses exportations. L’uranium est une ressource essentielle pour le pays, non seulement pour ses apports financiers, mais également pour son rôle stratégique sur la scène internationale. La suspension des activités de Somaïr pourrait entraîner une perte de revenus significative pour le Niger et aggraver la situation économique, déjà précaire, de la population locale.
Conséquences pour Orano et l’Industrie Nucléaire Mondiale
Pour Orano, cette suspension signifie un ralentissement significatif dans l’approvisionnement en uranium de ses clients internationaux. La demande mondiale d’uranium, stimulée par la transition énergétique et le recours croissant à l’énergie nucléaire, pourrait être affectée si cette interruption persiste. Bien que des stocks existent, la situation nigérienne fragilise l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement mondiale, renforçant la dépendance vis-à-vis d’autres pays producteurs comme le Kazakhstan et le Canada.
Des Perspectives Incertaines
Alors que la France et la communauté internationale surveillent attentivement les évolutions au Niger, la situation reste incertaine pour Orano. La reprise des activités nécessitera des négociations complexes avec la junte, qui semble bien décidée à redéfinir les termes de la coopération avec les entreprises étrangères. Certains analystes estiment que cette crise pourrait entraîner une révision en profondeur des relations économiques entre le Niger et ses partenaires, notamment dans le secteur minier, où les intérêts stratégiques se heurtent aux réalités économiques et politiques du pays.
Pour Orano, comme pour le Niger, cette suspension marque une étape décisive, illustrant les défis croissants auxquels sont confrontées les multinationales dans les environnements géopolitiques instables. La question de l’uranium nigérien restera un sujet sensible dans les mois à venir, entre pressions internes, besoins économiques et enjeux géostratégiques.