Joie et tragédie. C’est ainsi que le quotidien Bénin Intelligent a résumé le match qui a opposé le Bénin au Sénégal, samedi 17 juin, dans une de ses parutions récentes. Bien que ce match se soit terminé par un score d’un but partout, les avis commentateurs du football divergent sur la qualité de la prestation des Guépards. Mais, là n’est pas le problème. Car, il y a plus grave. L’euphorie qui s’est emparée des cœurs des Béninois a vite cédé sa place à l’émoi et à la consternation. On l’apprend d’abord par les réseaux sociaux puis l’information est confirmée par les autorités (Fédération béninoise de football, le ministère des sports puis le procureur de Cotonou). Elles rapportent que deux Béninois sont morts dans une bousculade au stade Mathieu Kérékou.
Le communiqué de la Fbf est resté silencieux sur les circonstances de ces décès. Celui du procureur du tribunal de Cotonou, Jules Ahoga, expliquera le lendemain, sans vraiment nous ôter d’un doute comment ce drame s’est produit. Selon les premiers éléments de l’enquête, les deux décès sont survenus après un malaise au moment d’entrer dans le stade. Le communiqué du procureur ne nous donne pas encore les causes précises mais il renseigne sur d’autres éléments intéressant. Premier élément, les faits se sont déroulés au niveau du portail S1 du stade. Les équipes de sapeurs-pompiers, du SAMU, de la Croix Rouge et de la Police républicaine étaient toutes là pour gérer la foule et aider les victimes. Mais alors qu’est-ce qui n’a pas marché ?
Le prix de la gratuité
Le procureur révèle que, pendant qu’on tentait d’aider les victimes, « certains supporters auraient passé par-dessus les gradins sans attendre l’aide des secouristes. Il a été enregistré dans ces conditions le décès d’une personne ». Voilà clairement comment le premier décès est survenu. Un mort, c’est un mort de trop. C’est inadmissible. L’origine de ce drame est, au-delà de tout ce qu’on dira les différentes enquêtes, la gratuité. Elle est devenue une norme au pays. C’est parce que le gouvernement a décidé de rendre gratuit l’accès au stade que tout ce monde a déferlé au stade. Le Béninois est malheureusement devenu accro de cette politique du gouvernement de Patrice Talon qu’on pourrait qualifier de macabre désormais.
Quoiqu’on dise le mal est déjà fait. On nous dira que oui c’est pour inciter les citoyens à sortir massivement pour soutenir l’équipe nationale. On nous dira aussi que toutes dispositions on été prises pour que tout se déroule bien. On nous dira que le Béninois n’a pas assez d’argent pour s’acheter un billet d’entrée pour suivre le match. Supposons que ce dernier argument était valable, à qui la faute ? A force d’habituer la population à la gratuité, on lui fait indirectement courir le pire des risques : la mort.
Nous savons tous que si le Béninois veut soutenir un évènement il le fait. Et, il le fait bien. On se souvient des concerts de Fally, de Gims ou de son frère Dadju dont les tickets ont été arachés comme des petits pains par les Béninois. On a vu Vano remplir l’esplanade du Canal Olympia Wologuèdè. A chaque Grande Réunion Familiale Elifaz remplit la salle rouge du Palais des Congrès. Pour suivre ces évènements, les Béninois désireux d’y participer se sont toujours procurés leurs billets d’entrée. Donc ce n’est pas la volonté qui manque. Ce n’est pas la culture d’achat de billet pour suivre un évènement qui manque au Bénin.
Un match de football ne peut pas être accessible à tous. C’est comme ça. Tout le monde ne peut alors pas aller le regarder au stade. Faire payer est d’une manière ou d’une autre un moyen assez efficace de dissuader la foule d’envahir les entrées du stade. Si le gouvernement tient à ce que le stade soit malgré tout rempli, il lui reviendra d’enjoindre le comité d’organisation du match de fixer les prix billets à des prix abordables pour le Béninois lambda. Encore que ces billets ne sont jamais aussi chers que ceux pour suivre les concerts de musique. Comme le disait un journaliste sportif dans un post facebook « si quelqu’un aime le foot, à vraiment envie de voir sa sélection nationale jouée, il ne se fera pas prier des billets à 1000, 2000 et même à 5000 ». Les gratuités (de la mort), on n’en veut plus au Bénin.
F.A.Y