L’émission 90 minutes pour convaincre du dimanche dernier a eu pour invités : Jocelyn Nahama Nénéhidini, politiste, et Josué Olatundji Chabi Kpandé, juriste, avec comme invité téléphonique le président Jacques Ayadji de Moele-Bénin. Pendant ce numéro de 90 minutes pour convaincre, les invités de Léa Yémadjro et Cécile Goudou Kpangon ont débattu autour du sujet suivant : « Le système partisan au Bénin, les conditions d’un renforcement de la démocratie ».
Des rappels conceptuels et historiques sur le système partisan et l’aperçu du contexte politique qui a justifié la réforme mise œuvre à partir 2018, le débat a conduit aux perspectives possibles en vue de l’amélioration et de la crédibilité du modèle béninois en construction. C’est à ce niveau que Jocelyn Nénéhidini invité au titre l’école doctorale de science politique de l’Uac, a estimé que les élections législatives pourraient accoucher de la même configuration que l’assemblée nationale sortante, en raison du seuil de 10 % qui pourrait, encore une fois, se révéler insurmontable pour plusieurs partis. Il prévoit même une résurgence de la crispation de l’atmosphère politique dès le début de l’année 2023.
Se projetant sur la perception dépréciative qu’une telle issue pourrait à nouveau engendrer sur l’image de la démocratie béninoise et par ricochet sur l’attractivité du pays, Nénéhidini s’est félicité de l’institution réussie d’une discrimination positive en faveur des femmes pour accroître leur effectif au prochain parlement et a mis l’accent sur la possibilité d’une discrimination ne serait-ce que symbolique en faveur de l’opposition politique.
En réalité, au vu des nombreux avantages et des privilèges octroyés au chef de l’opposition en exécution de la loi portant statut de l’opposition et qui ne paraissent profiter qu’à ce « général politique chanceux » sans véritablement servir à rafraîchir l’image de notre démocratie dans le monde, M. Nénéhidini s’est demandé si se baser sur le model romain « représentation des minorités nationales » ne serait pas une possibilité pour inventer une discrimination positive tout aussi symbolique en faveur des « minorités politiques » du Bénin qui sortiraient éventuellement des urnes en janvier 2023. En effet, en Roumanie, la représentation des minorités à la Chambre des députés, prévue par l’article 62 alinéa 2 de la Constitution dispose que « les organisations des citoyens appartenant aux minorités nationales qui ne réunissent pas le nombre de voix pour être représentées au Parlement dans les élections, ont le droit à un (1) siège de député, dans les conditions de la loi électorale. »
Ceci pourrait être dans l’intérêt de la gouvernance du président Patrice Talon et des partis politiques dominants qui le soutiennent, qu’une telle formule permette de donner, à l’avenir, un meilleur visage de « siège de la démocratie » à notre Assemblée nationale, toutes les fois que l’opposition n’arriverait pas à atteindre le seuil des 10 %. Il suffira de recourir au génie béninois pour imaginer les critères de désignation de ce « fou de l’hémicycle » qui certainement ne pourra pas vraiment impacter seul, les délibérations au parlement.
S’agira-t-il de désigner « le meilleur des derniers » ? S’agira-t-il pour ces derniers de s’entendre pour désigner un de leurs candidats recalés ? Des questions qui arrivent sans doute trop tard pour qu’il soit possible d’initier une quelconque modification des lois, mais qui témoignent de l’intérêt de prémunir les législatures futures, des critiques parfois exagérées distillées dans l’opinion nationale et internationale par une opposition politique à laquelle on pourrait reprocher un défaut d’organisation interne d’anticipation et de stratégie.
Matin Libre