Le ton monte des milieux politiques béninois. Alors que le pays aborde un tournant décisif pour sa prochaine consultation électorale, l’opposition politique au régime du président Patrice Talon, appuyée par la société civile s’organise pour des élections présidentielles sans exclusion. Réunis dans un collectif au siège du parti ”Les Démocrates” à Cotonou, ces acteurs par une déclaration, après un cinglant réquisitoire contre la gouvernance Talon, exigent entre autres, l’exécution des ordonnances de la cour africaine des droits de l’homme et des peuples Cadhp demandant à l’état l’abrogation de la constitution révisée, avant la tenue du scrutin. Ce combat vise selon les initiateurs, la restauration de la démocratie béninoise.
DÉCLARATION DU FRONT POUR LA RESTAURATION DE LA DEMOCRATIE (FRD)
COLLECTIF DE L’OPPOSITION
Béninoises et Béninois,
Chers compatriotes,
Depuis la Conférence des Forces Vives de février 1990, notre pays le Bénin, est reconnu sur la scène internationale comme le berceau du renouveau démocratique africain. En effet, cette conférence historique a révélé, aux yeux du monde, le génie de notre peuple de pouvoir trouver des solutions endogènes à ses problèmes. Elle a aussi montré sa capacité à se relever des situations les plus désespérées et à répondre à l’appel de son hymne national : ‘Enfant du Bénin debout’.
Pendant vingt-six ans (février 1990 à mars 2016), le Bénin a tenu son rang de pionnier et de modèle en matière de démocratie en Afrique après l’effondrement du mur de Berlin. Le système démocratique béninois fondé sur la Constitution du 11 décembre 1990, adopté par référendum du 2 décembre 1990 à une majorité écrasante par le peuple, a donné naissance à des institutions dont le fonctionnement exemplaire a contribué à l’enracinement de la démocratie dans notre pays, à sa consolidation et à l’instauration d’un climat politique et social apaisé.
Grâce au respect du principe de la séparation des pouvoirs, les institutions de contre-pouvoir ont pu jouer pleinement leur rôle et favoriser l’émergence d’un système démocratique respectueux des textes qui le régissent au plan interne et de ses engagements internationaux. L’organisation d’élections constitutionnelles à bonne date, l’alternance régulière au sommet de l’Etat, le respect des droits de l’homme et des peuples, la jouissance des libertés fondamentales, la préservation des acquis sociaux, la garantie des droits des travailleurs, etc.
Tels sont, quelques traits caractéristiques du système démocratique béninois hérité de la Conférence Nationale de février 1990 salué et admiré à travers le monde.
Mais, depuis l’accession du Président Patrice Talon au pouvoir le 06 avril 2016, la démocratie béninoise a connu un grand coup d’arrêt. En effet, sous le prétexte de réformes institutionnelles et politiques, le Président Patrice Talon a détruit, en moins de deux (02) ans après son arrivée au pouvoir, l’édifice démocratique hérité de la Conférence nationale de février 1990 que ses prédécesseurs successifs ont précieusement, entretenu et consolidé.
Aujourd’hui, le peuple béninois souffre de ce recul démocratique et s’organise pour la restauration de la démocratie et de l’Etat de droit.
Béninoises et Béninois,
Chers compatriotes,
Le Président Patrice TALON, depuis son accession au pouvoir, a entrepris la démolition du principe du consensus comme mode de gouvernance politique au Bénin. De 2016 à ce jour, son mandat a été marqué par des dysfonctionnements d’ordre institutionnel et juridique (adoption de plusieurs lois liberticides, la remise en cause de l’état de droit, l’organisation d’élections non inclusives, la révision opportuniste et non consensuelle de la constitution du 11 décembre 1990, le non-respect des droits et libertés, le refus d’exécution des décisions des juridictions nationales et internationales, la contrainte à l’exil de plusieurs citoyens béninois, etc.).
C’est dans ces conditions que l’Assemblée Nationale, issue des élections législatives non inclusives d’avril 2019, a modifié, dans le dos du peuple souverain et en l’absence de tout débat public les règles du jeu électoral.
Un système de parrainage rejeté par l’immense majorité du peuple béninois a été ainsi institué par la loi n° 2019-40 du 7 novembre 2019 modifiant la constitution du 11 décembre 1990 et entériné par la loi 2019-43 du 15 novembre 2019 portant code électoral. Le verrouillage de la vie politique amorcé par l’adoption de cette série de lois a été aggravé par l’installation d’un Conseil d’Orientation et de Supervision (COS) composé des seuls représentants de la majorité présidentielle.
Depuis lors, c’est à ce conseil, dont l’opposition est exclue, qu’incombe, en violation flagrante des usages consacrés en la matière pour garantir la transparence des élections, la charge de l’apurement et de l’actualisation de la Liste Electorale Permanente Informatisée (LEPI).
Malgré ces dysfonctionnements graves et les atteintes manifestes à la transparence du processus électorale, les alertes données par des partis et personnalités politiques de l’opposition ainsi que les organisations de la société civile ne semblent recevoir aucun écho favorable de la part du gouvernement.
Béninoises et Béninois,
Chers compatriotes,
Face au défi démocratique et à l’urgence d’une alternance au sommet de l’Etat, les partis, mouvements et personnalités politiques, opposés à la gouvernance du Président TALON ont décidé de la signature d’une convention pour mettre en place la plate-forme dénommée Front pour la Restauration de la Démocratie (FRD).
Les membres signataires de la présente déclaration s’engagent à unir leur force, pour provoquer dès 2021, l’alternance au sommet de l’Etat et restaurer les acquis démocratiques de notre pays.
A cette fin, le Collectif de l’Opposition exige :
– L’application immédiate des Arrêts de la Cour Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples demandant le maintien de la Constitution du 11 Décembre 1990.
– L’organisation d’un dialogue inclusif de tous les acteurs de la vie politique aux fins de déterminer de façon consensuelle les modalités d’une élection pacifique et démocratique.
– L’abrogation de toutes les lois liberticides votées au parlement pendant le mandat du Président Patrice Talon notamment la loi n° 2019-40 du 7 novembre 2019 modifiant la constitution du 11 décembre 1990, la loi 2019-43 du 15 novembre 2019 portant code électoral instituant le parrainage et la loi règlementant les droits de grève.
– Le respect des droits et libertés fondamentaux garantis par la Constitution et par les conventions internationales.
– Le retour de tous les citoyens béninois contraints à l’exil.
– La libération des prisonniers politiques.
– L’audit de la Liste Electorale Permanente Informatisée de manière consensuelle,
– La restitution et la garantie, aux travailleurs, de leurs acquis sociaux.
Enfin, les signataires de cette convention exigent le respect strict, par le Président Patrice TALON, de la durée de son mandat constitutionnel qui court du 06 avril 2016 à 00 heure au 05 avril 2021 à minuit conformément au serment qu’il a prêté devant le peuple béninois.
Le Front pour la Restauration de la Démocratie lance un appel vibrant au peuple béninois à rester mobilisé et prêt à reprendre le cours de son destin.
Vive la Démocratie !
Vive le Bénin !