Le Complexe Textile du Bénin, COTEB basé à Parakou au nord Bénin, autrefois l’un des fleurons de l’économie nationale fermé depuis 2016 pour des ”raisons économiques” se trouve dans un état de délabrement absolu et les rescapés du personnel plongés dans une situation très chaotique.
Tristesse mêlée à la dépression et au désespoir avec plus de dix mois d’arriéré de salaires impayés et des droits de licenciement non perçus, ils bravent quotidiennement de conditions difficilement soutenables sans aucune assistance dans la plus grande indifférence des autorités qui, depuis leur décision de fermeture de la société et de licenciement collectif des travailleurs observent la politique de la loi de l’omerta, le liquidateur introuvable.
C’est l’une des sociétés d’Etat à être fermée aux premières heures de l’avènement du Président Patrice Talon, chantre du nouveau départ à la tête de l’État Béninois. Il s’agit du Complexe Textile du Bénin (COTEB) ex-Ibetex dont la création remonte à 1971 par l’État. La principale raison évoquée pour justifier cette décision de fermeture est que, selon les sources officielles, l’unité de transformation du coton implantée à Parakou au nord du pays, tourne à perte. Un audit financier évalue à des pertes cumulées de plus de dix milliards de FCFA.
Malgré les subventions de l’Etat béninois au premier semestre de l’année 2016, le compte d’exploitation de l’entreprise comportait un déficit selon les résultats de cette évaluation, de plus de cent trente-quatre millions de francs. A la même période, les dettes cumulées de COTEB tournaient autour de six cent milliards FCFA. En son sein, le COTEB compte 6 départements de production à savoir: la filature, le tissage, la bonneterie, la couverture, la teinture, la confection sans compter les services généraux.
A cet effet, plusieurs audits dont le tout dernier en date de 2016, avaient pour objet de diagnostiquer la situation du COTEB, d’évaluer le patrimoine ainsi que les coûts d’un plan de désengagement de l’Etat de complexe. Suite à ces constats, I’Etat, par le biais du ministère de tutelle, a envisagé l’arrêt des activités de la structure suivi du licenciement collectif du personnel pour motif économique. Ce qui plonge la société dans un état de décrépitude sans pareille.
Visage actuel du Complexe
Depuis l’arrêt de son fonctionnement par le gouvernement à travers le Ministre de l’industrie et du commerce Lazare Sehoueto, suivi du licenciement collectif de ses agents, le COTEB présente un visage de plus en plus dégradant. Envahi par une broussaille, le site s’érige en nid d’insécurité en raison de son abandon.
Locaux délabrés et délaissés aux reptiles, aux rongeurs et autres, l’unité de transformation de l’or blanc présente l’image d’un lieu non visité, sans trace de présence humaine, du moins à l’exception des divorcés sociaux, pourtant implantée au bord de la voie inter-État Djougou-Parakou. Colère et indignation. les citoyens déversent impuissamment leur état d’âme.
“… Comment qualifier cette fermeture de COTEB ? Ça n’a pas de nom” déplore Sariki, un citoyen Parakois. Un avis partagé par Romaric Azangbé qui estime que l’acte du gouvernement n’est pas la panacée au problème. “Fermer ce complexe n’arrange même pas l’économie“, se défend-il avant de rappeler le passé glorieux du COTEB.
Pourtant le COTEB n’a pas été aussi négatif pour l’économie Béninoise
Le Complexe Textile du Bénin, considéré autrefois comme l’un des fleurons de l’économie Béninoise a connu des périodes de gloire. “Pour ceux qui ont connu l’histoire du COTEB doivent se rendre à l’évidence que la Société a laissé de beaux souvenir….le tissu kaki made in COTEB était une référence et convoité par les élèves dans le temps”, témoigne Fernand Sossou, quinquagénaire ancien fonctionnaire de la Société Béninoise d’Energie Électrique.
Les produits issus de l’usine COTEB sont recherchés à l’extérieur renchérit un ancien employé de la structure. “Lorsqu’on allait en compétition avec la serviette COTEB au plan mondial, c’est nous qui gagnons. Parce que le produit est 100% coton. En 2007, nous avons eu à produire et livrer le treillis pour les forces armées dans un marché gouvernemental auquel nous avons soumissionné“, confie l’ancien secrétaire général du syndicat des travailleurs du Complexe, Alpha Ibrahim qui, l’air désespéré raconte tristement la mésaventure et la précarité qu’ils traversent, lui et ses ex collègues.
Que sont devenus les agents du COTEB ?
La mise en cessation du fonctionnement de l’unité de transformation de l’or blanc implantée à Parakou, la Cité des Kobourou contraint plus d’une centaine d’agents, des pères et mères de famille au chômage. Ils souffrent le martyr sans la moindre réaction de leur ministère de tutelle mué dans un silence assourdissant.
De l’ex-ministre Lazare Sehouetou à l’actuelle Shadia Alimatou Assouma, un brin d’espoir n’a filtré, du moins jusqu’à la date d’aujourd’hui malgré les promesses. Dix mois d’arriérés de salaire, de droits de licenciement non perçus, le liquidateur introuvable, les travailleurs de l’ex-COTEB ne savent plus à quel saint se vouer.
“Chacun se débrouille à sa façon pour joindre les deux bouts. Nous n’avons pas encore perçu nos droits de licenciement légalement calculés à la main d’œuvre. Et jusqu’ici, nous ne savons pas à qui nous adresser”, se désole le délégué du personnel qui attend désespérément une réaction des autorités malgré les multiples démarches restées sans suite.
Le projet de liquidation de la société peine à prendre corps selon des sources dignes de foi. Déjà au chômage depuis plusieurs années, les travailleurs sont plongés dans une précarité extrême, d’autres contraints à une mort silencieuse. Survenir aux besoins des membres de leurs familles relève d’un véritable exploit pour eux.
“Par manque de moyens pour les soins, nous avons perdu dix des nôtres. 1000 ont manqué pour se soigner. Plusieurs ont perdu leurs épouses ou enfants sans assistance sociale, ou encore d’autres collègues ne savent pas où habiter parce que renvoyés par leurs propriétaires pour plusieurs mois de loyer impayé“, se lamente notre interlocuteur, les yeux presque chargés de larmes. Une situation qui préoccupe à plus d’un titre les citoyens et des parlementaires.
Le député Rachidi Gbadamassi et 30 autres de ses collègues parlementaires interpellent le gouvernement
Une question d’actualité suivie de débat signée par 31 députés a été adressée le 4 novembre 2019, au président de l’Assemblée Nationale du Bénin. Elle est relative à la situation du Complexe textile du Bénin (COTEB). Soucieux de la situation de « faillite et de cessation de paiement » que traverse le Complexe qui obligerait à sa liquidation et « face à une situation aussi complexe où rien n’est encore entièrement clair », les députés signataires ont voulu connaître : la situation actuelle que traverse le Complexe Textile du Bénin (COTEB).
Ils voudraient également savoir si, en dehors de la liquidation pure et simple du complexe, il est possible d’envisager d’autres solutions encore plus efficaces. En cas de liquidation du complexe, Rachidi Gbadamassi et les 30 autres députés signataires demandent à savoir le sort réservé pour les travailleurs du Complexe. Ils s’interrogent par ailleurs sur les mesures prises pour que le complexe ne quitte pas la ville de Parakou même s’il doit changer de dénomination. Mais au fond, le COTEB est-il impossible de ressusciter ?
“Il est bel et bien possible de faire renaître le COTEB de ses cendres si la volonté politique y est“, dixit le délégué du personnel. Selon Alpha Ibrahim le besoin de redynamisation du Complexe a été évalué. Il suffit de renouveler les équipements qui sont dans un état vétuste.
“…Ce sont des machines de l’époque coloniale. Depuis bientôt un siècle et demi que ces équipements d’origine polonaise sont importés et installés au Bénin. Ceci après plus de trente ans d’utilisation ailleurs. Ces machines d’environ deux siècles d’existence ne tiennent plus“, expose-t-il avant de s’interroger “Comment peut-on alors attendre de bonnes performances d’une telle situation quelque soit la volonté et dévouement manifestes des travailleurs“. En clair, il convient de déduire que la situation de “faillite” du COTEB tire principalement sa source de la vétusté des équipements.
La solution passe inéluctablement par la dégénérescence de la structure en équipements. Ce qui implique de lourds investissements indéniables à l’engagement et à la bonne foi des gouvernants mais qui, malheureusement depuis leur décision de fermeture observent la politique de la loi de l’omerta. A préciser qu’en son sein, le COTEB compte 6 départements de production à savoir : la filature, le tissage, la bonneterie, la couverture, la teinture, la confection sans compter les services généraux et l’administration. L’ex COTEB basé à Parakou au nord Bénin est spécialisé dans la transformation du coton en vêtements, tissus, treillis, serviettes et autres.
Suivez en l’audio cette enquête diffusée sur “Fraternité FM” Parakou.