Il n’est pas né une cuillère dans la bouche. Mais, il a su très tôt se prendre en charge. C’est donc un débrouillard, un jeune ambitieux et serviable. À 29 ans, Charles Djossou dirige depuis quatre ans sa propre entreprise : le Cabinet DKC Consulting. Juriste spécialisé en négociations contractuelles, il est aussi le Directeur de la Bibliothèque privée SLB Parakou. Son ambition, c’est de pouvoir donner de l’emploi aux jeunes. Dans cet entretien, Charles Djossou parle de son parcours inspirant. Entretien.
Le Parakois : Juriste de formation, aujourd’hui vous êtes chef d’entreprise. Comment y êtes-vous parvenu ?
Charles Djossou : Après ma licence en droit en 2014, j’ai effectué un court stage au Secrétariat Permanant de l’OHADA basé à Yaoundé au Cameroun, c’est un stage que j’ai décroché à la suite d’un concours d’art oratoire auquel j’ai participé un an plus tôt.
Du retour de Yaoundé, j’ai d’abord servi durant quelques mois dans ma cafétéria (située derrière le stade de Parakou et en face du camp Séro Kpéra) que j’avais ouverte quand j’étais en 2ème année de droit à l’Université de Parakou. C’est là j’étais quand j’ai été appelé par Maitre Joseph DJOGBENOU, l’actuel Président de la Cour Constitutionnelle du Bénin, pour servir dans son Cabinet annexe à Parakou. J’ai donc dirigé ledit Cabinet durant 2 ans 2 mois. Puis, après son entrée au premier Gouvernement de l’actuel Président, l’annexe du Cabinet a été fermée à Parakou. C’est alors que j’ai trouvé l’opportunité d’ouvrir un Cabinet de Juriste-Consultant, parce que le besoin existe. Durant mes années d’exercice au Cabinet de mon Maître, j’ai pu constater combien les justiciables souffraient beaucoup du manque de conseil et d’orientation dans leur procédure. Malheureusement, les juges ne peuvent pas se muer en conseiller juridique pour leur dire ce qu’ils doivent faire ou ne doivent pas faire. Et définitive, cela ne facilite pas la tâche à celui-là qui est appelé à trancher le litige. J’ai donc fondé en 2017 le Cabinet DKC Consulting, un Cabinet de Juristes-Consultants basé à Parakou.
Mais au début c’était le Cabinet de Consultation Juridique DKC, ensuite, le nom a changé et c’est devenu Cabinet de Consultation et d’étude pluridisciplinaire DKC, parce qu’en 2018 j’ai décidé de m’associer avec d’autres jeunes de compétences différentes. Ainsi, nous avions ajouté à l’objet initial du Cabinet, les conseils et assistances en agronomie et environnement, en compatibilité et finance, en sociologie et médiation sociale, puis en informatique. Malheureusement, cela n’a pas eu le succès qu’on avait voulu. Alors, nous avons mis cela entre parenthèse. Nous n’avons pas abandonné l’idée, non. Mais, nous travaillons toujours à mieux nous organiser. En attendant donc de revenir en force, nous avions dernièrement, notamment en 2019 changé une dernière fois le nom, qui est désormais CABINET DKC CONSULTING.
Est-ce qu’il y a une différence entre Juriste-Consultant et avocat?
Oui bien sûr. Certes, nous sommes tous des juristes. Mais, l’avocat a un champ d’intervention plus large que le Juriste-Consultant. Par exemple moi, je ne peux pas poser des actes dans une procédure judiciaire au nom d’un client. Cette une fonction propre à l’avocat. Par contre les conseils juridiques, la rédaction des actes sous seing privé, la conduite d’une médiation, la réalisation d’une étude juridique sont des fonctions que l’avocat et le Juriste-Consultant partagent.
Aujourd’hui, le métier de Juriste-Consultant et d’avocat dans un pays comme le Bénin devraient se compléter en ce sens qu’il y a beaucoup de localités au Bénin, qui n’ont pas un accès facile à un avocat. Un peu comme les cabinets de soins médicaux, il faut rapprocher les cabinets de Juriste-Consultant des populations, surtout des zones reculées. Cela, pourra aussi constituer une porte de sortie pour beaucoup de juristes formés et déversés sur le marché du travail. Mais, pour cela, l’Etat doit s’intéresser à ce métier et encadrer l’accès.
Daccord. Revenons au Cabinet DKC Consulting. Parlez-nous des services que vous offrez.
Le CABINET DKC CONSULTING a trois branches d’activité, à savoir :
DKC Conseil : elle s’occupe des conseils et assistances juridiques aux entreprises, ONG et aux particuliers, la rédaction d’acte juridique sous seing privé (contrats, engagements, etc.), les négociations contractuelles, la médiation, les formations en droit, les suivi-évaluations (ONG, entreprises).
DKC Service : ce service concerne le service de coursier. Ainsi, nous servons d’intermédiaires entre les agences de voyage agréées et les clients pour l’envoi et la réception des courriers et colis dans plusieurs localités du Bénin, à savoir Parakou, Cotonou, Abomey-Calavi, Bohicon, Abomey, Dassa, Savalou, Djougou, Natitingou, Kandi et Malanville. Nous sommes aussi sollicités quelques fois sur Ouagadougou (Burkina Faso) et sur Lomé (Togo). DKC service c’est aussi le retrait de divers actes administratifs, des actes judiciaires, tels que le casier judiciaire, le certificat de nationalité, la procuration, cession sur salaire, etc. le retrait d’attestation ou de diplôme divers.
DKC Immobilier : ici on fait de la gestion immobilière, notamment de la gestion locative et de la vente immobilière, des propriétaires d’immeubles, surtout ceux vivant hors de la ville de Parakou et d’autre hors du Bénin, nous confient la gestion de leur patrimoine immobilier sur place à Parakou.
À un moment donné le cabinet a failli être fermé. Pourquoi ?
Effectivement, après la première année d’exercice du Cabinet, nous avons été confrontés à des situations, qui ont failli nous pousser à fermer. Il y a entre autre notre première imposition. Le montant était vraiment élevé par rapport à ce qu’on avait fait comme recettes. En effet, au tout début, les populations n’étaient pas vraiment familiarisées avec ce genre de service. Ensuite, la plupart ne concevait pas l’utilité de la consultation juridique et n’étaient pas prêts à payer le prix. Il fallait donc s’adapter à la situation en leur faisant « goûter » au service. C’est ce qu’on s’était employé à faire durant la première année de la création du Cabinet. On s’employait plus à aider gratuitement les quelques personnes qui venaient à nous. On ne pouvait donc pas s’attendre à réaliser d’importantes recettes. Ce qui a fait que j’avais beaucoup de difficulté à faire face aux charges du Cabinet (facture d’électricité, loyers…).
Vous avez moins de trente ans et en quatre ans, vous avez su vous imposer dans votre domaine. Quel est le secret de votre réussite ?
A vrai dire, je n’ai aucun secret. Ce qui m’a permis de résister à la tentation de fermer après une année d’exercice et une année de galère, c’est d’abord le fait qu’au départ mon but principal n’était pas se faire immédiatement de l’argent. En créant le Cabinet, j’étais beaucoup plus mu par le désir d’aider les justiciables. Car, ce que je voyais et entendais dans les salles d’audience me faisait de la peine. Je ne pouvais pas rester indifférent devant cette ignorance-là. Beaucoup de justiciables agissaient par ignorance. La plupart n’avait aucune connaissance des lois et faisaient comme bon leur semble. J’ai pensé que la présence d’un cabinet comme ça aiderait beaucoup de gens.
Ensuite, c’est le sérieux que nous avions mis dans le travail, l’engagement, le désintéressement et surtout la loyauté de mes deux collaborateurs avec qui j’ai commencé cette belle aventure. Nous avons toujours constitué une équipe formidable. Nous formions tout simplement une famille. C’est le lieu pour moi de leur rendre un vibrant hommage. Je veux parler de monsieur ADIMI Thierry et de monsieur Judes da SYLVA. Je n’en serais pas arrivé là sans eux.
C’est donc tout cela réuni, qui m’a convaincu de continuer malgré les difficultés. Puis petitement avec le temps, nous avons commencé par enregistrer fréquemment des sollicitations. Et même si bon nombres ont encore du mal à payer le prix raisonnable, nous sommes satisfaits de l’intérêt qu’ils accordent aujourd’hui à nos services.
Qui sont vos clients ?
C’est d’abord la population en général. C’est toute personne qui sent le besoin d’être éclairé sur une question de droit ou toute personne impliquée dans une situation et qui sent le besoin d’être conseillée. Ensuite, ce sont les entreprises commerciales, les ONG, les associations, etc.
Il en est de même des autres services que nous offrons, je veux parler de la gestion immobilière et du service d’envoi et de réception des courriers et colis, du retrait d’acte administratifs ou judiciaires au profit de nos clients.
Par ailleurs, nous sommes de plus en plus sollicités par des ONG pour animer des conférences, des séminaires et formations sur des thématiques juridiques et sur l’entreprenariat des jeunes.
Votre ambition à court et à long terme.
D’abord, permettez-moi de dire que grâce à notre courage, notre persévérance et notre foi en notre vision, nous avons résisté à beaucoup d’obstacles et aujourd’hui, nous sommes heureux de voir les populations aller vers nous spontanément prendre conseil avant de poser certains actes ou lorsqu’elles se retrouvent dans certaines situations. Certes, il y a encore du travail à faire pour qu’une grande partie de la population ait le réflexe de la consultation juridique, mais nous pouvons nous réjouir des avancées notées.
Alors, venant à votre question, je vais peut-être vous surprendre, mais notre première ambition après plus de 3 ans d’existence est de pouvoir maintenant accroitre notre chiffre d’affaire et donner du travail à plus de jeunes. Car, ils sont nombreux ces jeunes que nous recevons chaque année en stage dans notre Cabinet, mais nous ne sommes pas capables d’en recruter quelques-uns malgré le besoin existant. Tout simplement parce que nous n’en avons pas les moyens. Figurez-vous qu’en trois années d’existence, nous avons reçu près de 51 stagiaires, tous des jeunes ayant fini leur formation.
Ensuite, nous avons un grand projet, celui de bâtir un Cabinet pluridisciplinaire avec plusieurs compétences réunir. Et nous y travaillons. Comme je vous le disais plus haut, on avait essayé. Ce qui nous a permis de relever les difficultés et de les travailler. Mais, ce qui nous bloque un peu, c’est le financement. Cependant, nous sommes convaincus que nous y arriverons.
Monsieur Charles Djossou, merci.
C’est moi qui vous remercie. A très bientôt.
Réalisé par F.A.Y