Les récentes révélations de Me Adrien Houngbédji jettent un pavé dans la mare du régime dit de la rupture. Dans une lettre officielle adressée au ministre de l’Intérieur, le président du Parti du Renouveau Démocratique (PRD) met à nu ce qu’il qualifie de manœuvres irrégulières autour de la fusion annoncée entre son parti et l’Union Progressiste le Renouveau (UPR). Avec des éléments probants à l’appui, Houngbédji conteste toute fusion, et surtout dénonce le traitement de faveur dont aurait bénéficié l’UPR dans l’obtention de son récépissé définitif, sans que les pièces exigées par la charte des partis politiques ne soient fournies.
Ces accusations, lourdes de conséquences, viennent ébranler une architecture politique déjà controversée depuis les exclusions massives de l’opposition lors des législatives de 2019. La fameuse charte, instrument juridique majeur de la réforme du système partisan, est aujourd’hui rattrapée par ses propres contradictions. L’affaire Houngbédji expose crûment une gestion à géométrie variable de la légalité, où la loi semble s’appliquer strictement à certains, et être contournée par d’autres, surtout ceux proches du pouvoir. Une situation qui renforce l’idée d’une République à deux vitesses.
Dans sa correspondance, l’ancien président de l’Assemblée nationale révèle notamment l’absence des procès-verbaux de fusion dans le dossier de l’UPR, pourtant requis pour obtenir le récépissé définitif. Comment le ministère de l’Intérieur a-t-il pu valider un tel dossier en l’état ? Cette question embarrassante relance le débat sur l’impartialité de l’administration publique et la sincérité des réformes politiques engagées sous la rupture. Le silence du ministère sur cette affaire devient de plus en plus pesant, alors que les preuves fournies par Houngbédji mettent en cause le respect même des fondements juridiques de la vie politique nationale.
Au regard de ces révélations, la maison rupture montre des signes d’effritement. Les fractures internes deviennent visibles, et la prétendue rigueur juridique qui a servi à écarter nombre de partis semble aujourd’hui utilisée de façon sélective. Pour nombre d’observateurs, cette affaire pourrait bien marquer un tournant : celui d’une remise en cause profonde de la légitimité des mécanismes ayant structuré le paysage politique béninois depuis 2019.